L’exemplarité du manager, posée comme une évidence
Au cours de mes tribulations au sein d’organisations très différentes, je suis frappé par le fait que la notion d’exemplarité soit souvent affichée comme une valeur cardinale indépassable. Cet attendu dans les pratiques et les comportements des managers est louable ; il parle de la crédibilité du manager vis-à-vis de ses équipes. Modèle à suivre, ce manager aura à cœur de ne pas attendre de ses collaborateurs ce que lui-même n’est pas en mesure d’accomplir.
Pour autant cette notion revêt différentes significations pour chacun d’entre nous : chercher à être irréprochable, devenir un référent, un point de repère, montrer par ses actes ce que l’on attend de ses collaborateurs.
De ce fait, l’exemplarité peut comporter des effets contre-productifs
Quand chacun agit selon sa propre conception de l’exemplarité
Si ce qui est attendu en termes de performance et de comportements n’est pas explicité et partagé par l’ensemble des acteurs de l’organisation, chaque manager devient seul juge de ce qui est souhaitable de promouvoir et participe, à son corps défendant, à une dispersion des pratiques managériales, parfois en contradiction les unes avec les autres. Dans ces conditions, quid de la crédibilité des lignes managériales ?
Quand le manager confond exemplarité et perfectionnisme
Ceci peut entraîner le manager à vouloir tendre vers un niveau de pratique inatteignable, donc anxiogène pour lui-même et pour ses collaborateurs vis-à-vis desquels il risque de devenir un éternel insatisfait
Quand l’exemplarité dispense le manager d’exprimer ce qu’il souhaite de ses collaborateurs
Combien de fois ai-je vu des managers agacés par leurs collaborateurs qui n’avaient pas su décoder, au travers de ses actes, ce qu’il attendait d’eux : « je leur ai fait comprendre que », « ils doivent bien se rendre compte que » sont des incantations qui dans les faits, sont rarement efficaces parce que ces managers n’ont pas exprimé clairement ce qu’ils voulaient.
Mais il est vrai qu’exprimer son désir, c’est prendre le risque d’essuyer un refus. Être exemplaire peut donner l’illusion de se prémunir de ce risque, puisque l’Autre, sans rien lui dire, comprendra de lui-même, ce que j’attends de lui.
En cela, l’exemplarité freine la mise en place du cercle vertueux de la relation exigeante dans laquelle un collaborateur accroît son niveau d’exigence vis-à-vis de son patron à la hauteur de ce que ce dernier pose ses exigences avec lui.
Parlons plutôt de cohérence
- Entre ce que nous disons et ce que nous faisons
- Entre ce que nous souhaitons de l’autre et ce que nous lui demandons
- Entre ce que nous voyons et nous pensons du travail de nos collaborateurs et les feed back explicites que nous ne craindrons pas de leur poser
Soyons donc cohérents, bien plus qu’exemplaires, c’est rassurant pour le collaborateur, c’est réaliste pour le manager. C’est plus efficace pour les deux … et cette vertu a le mérite de ne pas laisser planer le doute.