Je ne sais pas si vous observez la même chose, mais pour ma part, quand j’échange au téléphone avec mes relations, qu’elles soient confinées ou qu’elles travaillent sur site, je suis frappé par l’apparente disparité de leurs témoignages sur le fonctionnement de leurs organisations en ces temps de crise sanitaire.
Prenons deux situations qui m’ont été rapportées ces derniers jours :
- Dans le premier cas, mon interlocutrice relate une sorte d’état de grâce
Dans son entreprise, les décisions se prennent nettement plus vite qu’en « temps normal » et les problèmes sont traités sans délai. Par ailleurs, les difficultés liées à l’utilisation d’outils de pilotage différents d’un service à l’autre se sont résolus comme par enchantement.
La peur de se tromper (ou de devoir assumer une mauvaise décision) n’est plus un frein. Les problèmes d’égo et les logiques territoriales semblent s’être effacés derrière les exigences de simplification du télétravail.
- A l’inverse, un autre fait état des difficultés de relation avec le siège :
Les « joies » des visios saccadées par la saturation des réseaux, réunissant un effectif pléthorique et se déroulant en mode « top down » complet sans possibilité d’échanger.
Du coup, comme par ailleurs les managers directs sont sous l’eau, impossible non plus de s’appuyer sur eux pour faire remonter les besoins et spécificités terrain. Moyennant quoi, les décisions qui ne sont applicables que pour une partie des équipes tombent par notes … pour action immédiate par tous, avec les conséquences que l’on peut imaginer en termes de frustrations des uns et des autres
Que nous apprennent ces cas pour gérer au mieux la situation actuelle, mais aussi pour alimenter un retour d’expérience quand nous serons sortis de la crise ?
Dans le premier cas : La situation exceptionnelle a facilité la régulation des comportements contre-productifs. Comment fiabiliser cette avancée ? Les membres de cette équipe gagneront sans doute à échanger de manière explicite sur ce qui a fonctionné, à s’appuyer dessus pour exprimer mutuellement leurs besoins. Cela leur permettrait de prendre en compte les contraintes des autres dans une logique de coopération portée de manière proactive par leur motivation et non en mode réactif, sous la contrainte d’une crise extérieure.
Dans le second cas : le caractère exceptionnel du moment a agi comme un amplificateur des tendances. Il ne crée pas forcément de nouveaux fonctionnements, il rend juste plus visibles des comportements qui se manifestent habituellement en signaux faibles. Même en cas de crise, il est possible pour chacune des parties concernées d’identifier ce qu’elle peut faire pour adopter un fonctionnement efficace et satisfaisant : s’intéresser à la logique de l’autre et faire part de la sienne. Pour aller plus loin, nous vous proposons de glaner quelques idées au travers d’une (re)lecture de l’article « Peut-on rester loyal quand on est en désaccord avec son patron ? » sur la page actualité de notre site.
Rien de commun entre ces deux cas de figure ? Pas si sûr !
Dans les deux cas, il est question de prendre des initiatives relationnelles, de prendre le risque de dire ce dont nous avons besoin pour faire notre job sans avoir peur de décevoir, d’être jugé, de paraître faible ou incompétent.
Dans les deux cas, il est déterminant d’être prêt à assumer des situations de désaccord, de traiter des objections, de réitérer l’expression de nos demandes.
Et pour chacun d’entre nous, que nous révèle cette crise sur notre capacité à exprimer librement nos besoins et nos gênes ? Que met-elle en lumière sur l’efficacité de nos interactions avec nos patrons et nos collaborateurs, sur la dynamique de nos équipes. Que peut-on en retirer pour gagner en performance maintenant mais aussi au sortir de cette crise ?
Pour conclure, en période de pandémie comme en temps « normal », en collaborant à proximité, en dirigeant à distance ou en télétravail, rien n’est dû, tout est à demander. Même (et surtout ?) si on pense que l’autre risque de ne pas être d’accord du premier coup !